Comes from Hell – Marryssä / Lazarus

Je lisse les pans de ma robe d’ambassadeur avant de rentrer les mains dans mes manches, l’une dans l’autre. Je fixe sur mon visage un masque impassible, le masque du conseiller. Rien n’est lisible dessus, si ce n’est un certain mépris. Simple, efficace, professionnel. Ce n’est pas quelque chose pour laquelle j’ai besoin de forcer, c’est dans ma nature. Et surtout, ça concorde parfaitement à la situation. J’ai eu beau me porter volontaire pour cette mission d’ambassadeur, rejoindre un royaume d’hybrides me répugne assez.

Finalement, après une demi-heure d’attente, voilà que l’on va me présenter au roi et à la princesse. Un roi sénile et une princesse volatile. Voilà la raison profonde de ma venue. Ils sont manipulables. Tout comme les conseillers et les nobles de ce château, que je méprise déjà sans même les avoir rencontrés. Sont-ils au service de sa majesté, ou au service de leurs banquets et de leurs confrères ? Il est temps de remettre de l’ordre par ici. De faire rentrer dans les rangs les contrevenants. De dresser cette princesse et de la mettre enfin sur le trône. Car c’est bien là l’objet de mon plus grand mépris ; quelqu’un indigne de sa fonction.

Les deux gardes postés devant les doubles portes du trône ouvrent les battants. Je m’avance droit devant, marchant vers le trône. Je ne peux m’empêcher de faire la différence avec l’ancien palais que je fréquentais. Celui-ci est plus lumineux, mais également plus décoré. L’ancien était plus spartiate, plus guerrier. Il y avait également plus de guerriers. Mon regard cherche les différentes issues, et les différentes failles dans la sécurité. Finalement il passe sur le roi et la princesse. Mon masque ne tressaille pas. Je pose finalement genoux à terre à une distance respectable. Le diablotin a joué son rôle de messager, les royaux sont au courant de la raison de ma présence, mais cette présentation est nécessaire. Je rencontre mes nouveaux maîtres, mes futurs égaux si tout se passe bien.
Je prends parti de rester silencieux, attendant patiemment que le roi ou la princesse prenne la parole. Ainsi sont faites les règles, de là où je viens.

J’aurai pu hausser un sourcil en entendant la princesse parler la langue des démons. Mais je reste de marbre, bien que ce fait soulève mon étonnement. Je redresse la tête avant de me déplier et de me redresser, les mains toujours dans les manches. J’intercepte du regard un ministre qui s’est penché à l’oreille du roi pour lui chuchoter quelque chose. Soit des mises en garde, soit une simple traduction des propos de la princesse.
Je laisse un blanc passer, où je soutiens le regard de chaque personne dans la salle, afin que tous prenne conscience de ma présence, et de mes origines démoniaques. Certains nobles détournent la tête, et seuls les gardes sont assez courageux pour tenir le coup.
Finalement je reporte mon regard sur la princesse, puis sur le roi, m’adressant ostensiblement à ce dernier, en langue humaine ;

« Je me nomme Lazarus. Je suis un ancien conseiller du roi, et je suis envoyé en tant qu’ambassadeur afin de garantir la paix entre nos royaumes. Mon dernier ordre reçu a été de me mettre sous les vôtres. »

Je ménage une nouvelle pause pour amplifier l’impact de mes mots, que ces derniers fassent leur chemin jusqu’aux cerveaux des nobles. Ces derniers sont souvent un peu long à la détente, surtout les humains. Je pose mes yeux à la pupille verticale avant de lui répondre en Domaë, par simple esprit de jeu, sachant pertinemment que ça va faire monter les murmures contrariés et effrayés ;

« Je vous remercie de votre accueil, princesse Marryssä. »

Je prends acte de l’ordre sans broncher. Passer sous les ordres de la princesse ? Pourquoi pas. J’acquiesce en abaissant légèrement la tête. La princesse répond, et je décèle un tremblement léger, accompagné d’une légère froideur dans la voix. Cela ne lui plait pas. Elle à l’air d’avoir un caractère horrible. Finalement n’a-t-elle peut être pas menti ; il y aurait bien un peu de sang de démon dans ses veines. Lors du léger mouvement de main du roi pour nous congédier, la princesse n’attend pas, fait une révérence qui passerait pour un outrage envers n’importe qui, et se détourne dans un mouvement de tissus, digne enfant royale et capricieuse. Je me permets d’arquer un sourcil, première et seule marque d’émotion sur mon visage.

Un homme que j’avais à peine remarqué s’approche alors de moi. Il me prie de le suivre. Je m’incline devant le roi avant d’obéir à l’homme. Nous n’échangeons pas un mot durant le trajet, et je l’observe de dos. J’ai repéré quelques signes démoniaques en lui, mais je sens qu’il ne l’est pas entièrement. C’est un hybride, un bâtard. Mais au moins notre sang prédomine dans ses veines ; il est plus démon qu’humain. Je ne me fais pas de préjugés sur lui cependant ; je n’irai pas juger quelqu’un sans le connaître précisément, savoir ses forces et ses faiblesses.

Mon escorte frappe légèrement à la porter avant de me faire entrer. Je devine que les personnes qui sont là sont la garde rapprochée de la princesse, et j’analyse les positions de chacun. Deux personnes à la fenêtre, une à la porte, et une derrière elle, sans compter celui qui m’accompagne. La stratégie est bonne, mais il faut voir les prédispositions de chacun. Les plus offensifs à la fenêtre et à la porte, les défensifs en retrait derrière la princesse pour la protéger. S’ils ont effectivement agit ainsi, je peux déduire rapidement leurs capacités.

La princesse prend la parole, après avoir finit de lire un document, et je reporte mon regard sur elle. Je ne sais comment interpréter ses paroles. Est-elle réellement désolée ? Son visage n’en montre pas réellement les signes, et au vu de ce qu’elle a dévoilé tout à l’heure, elle doit avoir trop de fierté pour vraiment penser à ses excuses.
Le sourire qui se dessine sur ses lèvres ne m’échappe pas. Elle regarde quelque chose dans la pièce, une chose qui m’est invisible. Je devine aisément la présence d’un esprit. N’ai-je pas entendu qu’elle avec des affinités avec quatre éléments ? De parfaits espions. Je ne laisse pas de trace de mes réflexions sur mon visage, me contentant de répondre ;

« C’est un ordre comme un autre. Cependant, je tiens à vous informer que si la paix ne se maintient pas, j’ai pour ordre de revenir auprès des miens. »

Je n’ajoute rien. Dire que j’espère que la paix durera éternellement ? Je ne le pense pas. Trop de différences entre les humains et les démons. Et puis, les souverains aiment se faire la guerre quand ils s’ennuient.

Je pose le document que j’ai dans les mains sur le mon bureau, laisse un silence avant de répondre, pesant mes mots, cherchant quel est la bonne stratégie à adopter avec ce nouveau venu. Je pose finalement mon regard sur lui avant de lui parler, tachant, tant bien que mal d’ignorer les pitreries de mes chers esprits :

«  J’espere que vous n’aurez pas a rentrer chez vous rapidement, une guerre avec les démons n’est assurément pas profitable au peuple humain, sans compter que les Hommes trouvent bien assez d’excuses pour ce battre entre eux, autant essayer d’éviter une guerre avec les démons. »

Pour une fois je suis parfaitement sincère, je ne tiens absolument pas a avoir une guerre entre les Hommes et les Démons sur les bras, cela voudrais dire mobilisation de la population à potentiel magique pour les brigades, mobilisation de fantassins pour les casernes et bien sur, finalement ce serais aux peuple de payer le prix fort pendant que les nobles serais en train de se gaver de gibiers bien à l’abri derrière les murailles de leur châteaux. Je signe finalement le document avant de le redonner à Daisuke en silence, les yeux dans le vague pendant qu’il le vérifie de son œil expert je reporte mon attention sur Lazarus

«  Je vais vous présenter les autres, puisque vous devez travailler ensemble autant connaître le nom de chacun. A ma droite voici Daisuke, devant la fenêtre tu trouveras Mirage et Yawë, quand à celui qui t’a amené ici il se nomme Delva. Ma garde comporte normalement 5 personnes, maintenant 6 avec vous, le dernier est en mission en ce moment, vous le rencontrerais bien assez tôt. »

Chacun s’inclina à l’entente de son nom, le nouveau venu pu ainsi identifier chacun de ses collègues sans soucis. Je laissais volontairement en suspend la question des spécialisations de chacun, il aurait bien le temps de voir par lui même quelle était les compétences des un et des autres. Sans parler qu’étaler les capacités de ma garde n’était pas dans mes habitudes. Bien qu’habituée a leurs fausser compagnie je ne révéler pas leurs secrets. Je vis mes esprits s’aligner devant le bureau avant que Dimitry ne me regarde avec un grand sourire, sans un mot, juste un sourire, je m’exécutais :

«  Il en me reste plus qu’a te présenter mes gardiens et protecteurs les plus proches, mes esprits, au nombre de quatre comme tu le sais peut être voici, Dimitry, Leila, Herma et Sylva. »

Les esprits apparurent en même temps que leurs noms, devenant visible aux yeux de tous, ils ne firent aucuns signes de respects, se contentant d’apparaître tout sourire, face à notre nouvel invité. Je m’aperçus de deux choses distinctes à cette instant, la première c’est que je l’avais tutoyer sans son accord, impolitesse majeur de la part d’une princesse mais bon, mis à part me considérer encore plus comme une enfant gâtée cela ne changerais pas grande chose. La seconde était que Mirage avait disparue, usant de sa magie de l’air certainement.

Je ne commente pas la remarque de la princesse, préférant le silence. Finalement, après un bref silence, elle me présente chaque personne  de la pièce, et je pose les yeux sur chacun, sans pour autant montrer de geste de politesse. De part mon sang et mes origines, je leur suis supérieur. Un noble n’aurait pas à l’idée de s’incliner devant un être inférieur. Plus encore un démon devant un simple humain.
A la fin du tour des noms, mon regard revient sur la princesse. Elle semble plus ouverte que quelques minutes avant. C’est une personne enjouée, facile d’approche. Facile à manipuler.

« Bien, Princesse. »

C’est tout ce que je trouve à dire. Je ne vais pas répéter mon nom, ce serait idiot. Dire que je suis heureux de les rencontrer ? Ca reste à démontrer. Je n’ai pour eux aucune sympathie, ils me sont totalement égal. Ils sont là, point. Ils pourraient être des plantes vertes, l’effet serait exactement le même pour moi.
La princesse reprend la parole. Elle me présente ses esprits. Lorsque le premier apparait, je cille. Quatre, effectivement. Quatre paires d’yeux supplémentaires qui vont m’observer  et me juger. Quatre esprits en plus à berner, comme si un royaume n’était pas déjà assez.  Du coin de l’œil, un changement auprès de la fenêtre attire mon attention. Une absence. Ils étaient deux. Je tourne très légèrement la tête afin de couvrir mon angle mort. Je ne me trompe pas, la dénommée Mirage a disparue. Il faudra se méfier d’elle aussi, elle ne s’est pas simplement déplacée elle a complètement disparue. L’une de ses missions sera sûrement de me surveiller les premiers temps. Je dois montrer patte blanche. Je reste impassible, reposant les yeux sur la princesse. J’ajoute, avec une pointe de pince sans rire ;

« Cela fait beaucoup de noms à retenir. »

Tout est calculé. M’attirer la sympathie de la princesse, devant ses gardes. Montrer un peu de chaleur, une faille dans mon masque. Et puis ensuite, ensuite… Les femmes aiment se sentir spéciales. Il suffira d’être plus doux quand nous ne serons que tous les deux, quand cela arrivera, et plus froid avec les autres. Faire comme s’il n’y avait qu’elle pour moi. Un mensonge, une apparence à tenir. Cela ne sera pas trop compliqué, mais il faudra jouer sur le temps. Ne rien brusquer, sinon cela sentirait le traquenard. Y aller pas à pas, naturellement…  Je suis un homme horrible. Cette pensée, cependant, ne me déconcerte pas. Cela fait bien longtemps que j’ai réalisé que j’étais ainsi. Nous avons tous en nous une partie d’obscurité. Mais la princesse ne souffrira pas en tombant dans mon piège. Contrairement à d’autres démons, et je pense notamment à mon frère Amadeus, je n’aime pas la souffrance. Je suis plus retors, mais également plus doux.

On finit par apprécier mon venin.

Spoiler:

En effet, cela faisait peut être beaucoup à retenir, sans parler des nom, il y avait l’étiquettes et les coutumes des humains à aborder. Si Lazarus  était un démon pure souche ayant jusque la vécu uniquement dans le Hell, alors effectivement les changements devaient être assez spectaculaires. Ayant était reçus dans le palais du royaume des Démons il y a quelques temps je me souvient parfaitement de la noirceur ambiante, du manque de décoration et de l’atmosphère qui régnait la-bas, totalement différent d’ici ou, mis à part dans le bureau ou nous nous trouvions, j’avais fait en sorte d’avoir des entré de lumières importantes partout ou je devais passer du temps. Pourquoi avoir choisis de mettre plus d’obscurité dans le bureau ? Et bien parce que j’y recevais régulièrement des démons et que pour leurs conforts cela me semblait indiquer. Enfin, cela est un autre sujet. Les esprits disparurent sauf Dimitry qui viens à ma gauche, à la place de Shin, en flottant doucement au dessus du sol et vint m’attraper la main pour me réconforter de l’absence de mon amoureux peut être. Après m’être perdu dans le regard gris de mon amis et gardien je me tournais vers Lazarus

«  Je comprend que cela face beaucoup, surtout si tu n’a jamais mis les pieds sur le Royaume des Hommes, mais il est important que tu apprenne rapidement, je te fais confiance sur ce point. »

La fin de ma phrase avait toute son importance, je venais de lui notifier que je ne suis accordais presque aucune confiance, sinon pour apprendre a se fondre dans le paysage comme un bon petit toutou. Daisuke m’indiquais déjà le document suivant et je retiens un soupir en voyant qu’il s’agissait d’une liste des personnes avec un potentiel magique présentent dans le palais. Je posais le document sur une pile que j’avais dédiée aux affaires magiques tout en posant une question au nouveau venu :

«  Dit moi Lazarus, serais-tu d’accord pour m’indiquer tes affinités magiques ? Je suppose que tu es voué aux ténèbres mais as tu une autre affinité ? »

Je me suis retenue de dire ‘ comme un bon petit démons’ déjà que je ne savais comment gérer la situation actuelle alors je voulais autant que possible éviter de me le mettre à dos, en tout cas de façon trop flagrante.Il était évident que Mirage et Delva n’approuvaient pas le choix du rois, Yawë était plus difficile a déchiffrer et je ne savais pas encore si elle n’aimait simplement pas cette personne ou si c’était autre chose qui lui avait déplus. Quand à Daisuke… je n’avais nulle besoin de lui demander, je savais qu’il se méfiait, il se méfiait toujours au début et de n’importe qui. Je serrais inconsciemment la main de Dimitry, j’aurais eu besoin de Shin à cet instinct, mon insolent compagnon aurait tenté de briser la glace, il aurait fait en sorte de lever cette atmosphère pesante qui venait de s’installer dans mon bureau.

Je garde le regard vissé sur la princesse, même quand le dernier esprit visible vient prendre sa main. Un acte de tendresse et de support, qui n’a cependant rien à faire là. Tout ce que je peux en déduire, c’est que c’est une femme fragile, qui ne pourra pas tout porter sur ses épaules. Je m’abstiens de froncer les sourcils. Elle m’ignore un instant puis reviens à moi. Je note l’appui sur la fin de sa phrase, et je laisse échapper l’ombre d’un sourire. Tout est en nuance, en sous entendu. Bien.

« Je ferai de mon mieux, Princesse. »

Montrer patte blanche. Et puis, je ne mens pas, cette fois ci. Pas de demi-mot, une simple vérité qui sonne comme une promesse sans en être une. De toute manière, apprendre à, me comporter comme ces barbares d’humains, je n’aurai rien de mieux à faire tant que je serai à son service. Leurs manières sont pataudes, toujours emplis d’un désir de reconnaissance de la part d’autrui… Et pour la plupart, avec un peu d’argent on achète leur loyauté. Je ne les rejoindrai pas sur ce point, et je compte bien dénicher chacun de ses mercenaires pour leur inculquer la loyauté à la couronne.

L’attention de la princesse se détourne, et j’en profite pour me concentrer sur ce qui m’entoure, tentant de dénicher l’absente ; chose vaine. Comme si elle s’était téléportée ailleurs. Il faut que je trouve une parade contre sa présence invasive. La femme devant moi reprend la parole en me posant une question, et reprend ainsi mon attention.

« Je n’ai d’affinité qu’avec les ténèbres, je le regrette.Mais je suis spécialisé dans la défense. »

Avec un sourire insolent, je détaille les gardes visibles qui semblent alertes, prêts à me sauter à la gorge au moindre soupçon ;

« Je ne suis pas vraiment quelqu’un d’agressif, et si je peux éviter de me retrouver plein de sang, j’évite. Cela donne un très mauvais effet. »

Je me reporte à la reine, sans quitter mon sourire ;

« Comme vous pouvez le déduire, Princesse, je serai un bien piètre garde du corps. »

Je préfère garder pour moi mon affinité avec l’eau. C’est un de mes nombreux secrets, et cela ne cause de tort à personne de l’ignorer. De toute manière, je viens bien de leur signifier qu’ils ne pouvaient pas compter sur moi dans un combat. Je sais me battre, évidemment, j’ai eu une éducation aux armes. Et contrairement à ces hybrides et ces humains, je ne tire pas mes pouvoirs d’un esprit. La magie est dans mon essence, et je sais coupler mes armes et mes boucliers instinctivement. Mais ça aussi, ils peuvent bien l’ignorer. Ca me laisse une carte maîtresse à abattre en cas de problème, un élément que personne ne pourra soupçonner tant que je le tairais. Et parmi les démons, le seul à pouvoir me trahir ne le fera pas. C’est qui est génial dans les complots, avoir des points de pression sur autrui pour garder sous silence ce qui doit l’être.

Le sourire de la princesse est légèrement pincé. Elle me soupçonne mais ne peut pas mettre de mots sur ses doutes. Je reprends mon masque de neutralité le temps d’un instant, avant de feinté la surprise et de demander innocemment ;

« J’aurai donc droit au port d’armes dans le château ? »

Seraient-ils assez stupides pour me l’autoriser ? Et surtout, me feraient-ils l’affront de me l’interdir, alors que je suis censé un ambassadeur avec pour nouvelle mission de protéger la princesse ? J’ignore ostensiblement le passage sur Daisuke bien que je lui accorde un coup d’œil. Le capitaine, donc. Nous verrons s’il mérite le titre, et s’il mérite mon obéissance. J’ai toujours du mal à me soumettre aux idiots.
L’ambiance change alors, tandis que le silence s’installe. La future reine change de position, on frappe à la porte et un homme entre. J’ai à peine de temps de faire un pas qu’il passe en trombe et s’arrête devant la princesse, m’ignorant superbement. Je reprends mon masque d’impassibilité teinté de mépris, tandis que la princesse salue le nouveau venu. Je devine un lien assez fort entre les deux, puisque peu de personne aurait prit le parti d’entrer ainsi en présence d’un membre de la famille royal.
Je baisse la tête, remonte les bras tout en gardant les mains jointes dans mes manches et je tousse, chassant un élément gênant imaginaire de ma gorge, afin de rappeler ma présence. Je me permets de prendre la parole, lançant d’une voix neutre ;

« J’imagine qu’il s’agit de la dernière personne qu’il manquait ? »

Autant de déduction que de hasard. Si je ne me trompe pas, au mieux j’aurai l’air perspicace, au pire cela n’aura aucune incidence. Et si je me trompe, j’aurai simplement l’air stupide. On se méfiera moins de moi en me prenant pour un idiot et je pourrai entendre des choses intéressantes. Dans les trois cas, cela ne me fait pas de tort au final. Risques calculés, rentabilité accrue.

Le nouveau venu se place à la gauche de la princesse et je cela confirme mes suppositions ; il a un lien spécial avec elle.  Je souris intérieurement. Quant à sa réponse, alors qu’elle a haussé la voix, perdant ainsi son calme, je reste impassible. Elle ne sait pas se tenir, est trop ouverte, trop dans la démonstration de ses sentiments. Autant d’erreurs que de faiblesses, sans compter son besoin de soutien extérieur. Il faudra pallier à tout cela et de façon rapide car des personnes plus malintentionnées que moi pourraient en profiter. Elle n’a jamais rencontré de personne dangereuse, c’est pour cela qu’elle agit ainsi. Adopter une attitude neutre, ne pas laisser transparaître ses émotions, est la meilleure arme que peut avoir un noble. Il faudra lui apprendre, car elle est encore jeune et non impliquée dans les jeux de la cour.
Elle confirme sans me tarder que le nouveau venu est donc le tout dernier de la garde royal. Je le détail sans me cacher. Bien bâti bien que fin, il est à mon opposé avec ses cheveux blonds et courts. Même nos regards, pourtant clairs tout deux, sont différents, dû à ses pupilles rondes basiques de simple humain. Il détourne la tête, dans un affront clair et je note de lui faire ravaler sa fierté mal placée devant un être supérieur à lui. Je l’éduquerai également, quand j’aurai un peu de temps.

« Aucune question, simplement des remarques, Princesse. »

Je donne une intonation légèrement différente dans le mot, laissant glisser l’accent Domeä, un accent naturellement plus doux et sensuel que l’accent humain qui hache et rend les mots coupants.

« J’aurai besoin de connaître les coutumes humaines relatives au palais afin de facilité mon intégration, ainsi que de recevoir une liste des principales personnes du château qui gèrent les affaires domestiques, telles que les cuisines, les capitaines de la garde et les nobles les plus influents afin de me familiariser avec tout cela. »

Je laisse passer un silence, comme si je réfléchissais. Puis j’ajoute, en empruntant un ton négligeant ;

« Ma Förna rejoindra le château dans quelques jours, mais ne vous tracassez pas pour cela, elle est discrète et saura se rendre utile là où l’on voudra bien l’envoyer. Elle logera avec moi. »

Là encore j’utilise l’accent domeä pour appuyer sur le mot "förna", profitant de la connotation sexuelle que cela possède, par pur jeu. Le sens est différent chez les humains que chez les démons. Une förna démoniaque se rapproche d’une dame de compagnie humaine. Elle est présente, tantôt servante tantôt accompagnatrice, très utile lors des banquets et parmi la cour puisqu’elles écoutent les bruit de couloir. Une paire d’oreille et de mains supplémentaires. Souvent des amies de leur maître ou de leur maîtresse, parfois des servantes, parfois également des maîtresses, c’est cependant une pratique assez répandue chez les démons nobles, dont certains vont jusqu’à se constituer des harems. Personnellement je n’en ai qu’une, et elle me suffit. Aimée demande beaucoup trop d’attention et de temps, je n’ai plus rien à consacrer à une seconde. N’empêche qu’elle est rudement pratique, bien qu’elle ne possède pas une once de méchanceté et qu’elle soit tout à fait consciente de ma fourberie et l’ai en horreur. Les gens ont tendance à se confier spontanément à elle, oubliant qu’elle m’appartient. Un pion très utile dans le jeu d’échecs de la politique.

Spoiler:

Je prend note des demandent plutôt légitime de Lazarus et je m’apprête a lui répondre quand il ajoute quelque chose au sujet de sa suivante… Je plisse les yeux pas très heureuse d’apprendre quelque chose d’aussi important si tardivement dans la conversation. j’arrête d’un geste Yawë qui avait déjà fait un pas en avant pour protester, et je reporte mon regard sur Lazarus. Regard de princesse parfaite, juste assez de mépris dedans pour qu’il comprenne qu’il n’était pour moi qu’une larme n’ayant pas plus de valeur qu’une fourmis et je lui répondis :

«  Pour ce qui est des us et coutumes humains j’ai déjà une idée pour toi, tu accompagneras chacun de mes gardes pendant une journée à partir de demain, cela t’apprendras tout autant l’architecture du palais que le personnel de référence. Pour ce qui est de la personne qui dois arriver… tu me la présenteras le soir de même de son arrivée ! »

Je n’avais pas pour habitude de traiter des serviteurs avec mépris mais je n’aimais pas que l’ont m’impose quoi que ce soit contre ma volontés sans même m’en parler. Connaissant la nature des relation entre un Noble Démoniaque et une Förna je ne pouvais interdire qu’elle arriva, mais je devais au moins jouer mon rôle dans cette histoire, déjà que faire accepter un démon dans le palais serais compliqué mais si en plus il criait sur tout les toits qu’il avait ce type de lien… Les humains ignorants avaient, il y a longtemps, transformé le sens de ce mot pour en faire une insulte… faisant ainsi référence aux femmes de petite vertus que l’ont rencontre parfois sur les docks des villes portuaires.
Ce fut Daisuke qui interrompis mon élan de noblesse «  Marry, la réunion approche »
Je levai la tête vers lui en réalisant qu’effectivement j’avais complètement oublié que j’avais une réunion des plus importante. Je soufflais calmement avant de sourire

«  Messieurs, Dehors ! »

Un ordre simple et rapide, Delva et Daisuke saluèrent et s’éxécutérent tandis que Yawë s’approchait de moi en souriant, Shin fit mine de vouloir rester et je lui fit signe de sortir immédiatement. Mais ce n’est qu’en voyant enfin la robe que Yawë venais de sortir du placard qu’il accepta de m’attendre à la porte.

Accompagner ses gardes ? L’horreur. Et cinq jours de formation ? Allons bon. Faisons avec. Finalement elle exige de rencontrer Aimée le soir de son arrivée. Demande légitime.

« Bien, princesse. »

De toute manière je n’ai pas à contester. Je regrette cependant de ne pas avoir réussit à lui arracher la réaction que je voulais.
Le dénommé Daisuke prononce quelques mots auxquels je ne prête pas attention. Pas mes affaires. La princesse nous congédie de façon brutale. J’arque un sourcil, avant de m’incliner à mon tour, rapidement, et d’emboîter le pas aux deux précédents. Apercevant du coin de l’œil le dénommé Shin qui traîne, je décide de façon mesquine de créer un petit bouclier invisible au niveau de ses pieds.
Le bruit qui accompagne mon geste me prouve que j’ai réussi, et je supprime immédiatement le bouclier pour ne pas laisser de trace. Je me retourne, sur le pas de la porte, pour découvrir Shin étalé par terre. Je laisse peser sur lui tout mon mépris, de façon très visible, et je lâche un discret

« Pathétique. »

Accompagné d’un regard qui veut tout dire. Je me détourne dans un mouvement de tissu et rejoint les deux autres gardes de l’autre coté de la porte, ignorant superbement l’autre blond que je viens de ridiculiser sans même qu’il s’en rende compte. Sa vie va devenir beaucoup plus compliquée maintenant que je suis là. Comme je l’ai dit, il faut l’éduquer.
Je demande à Delva et Daisuke, d’une voix neutre ;

« Devons nous faire acte de présence lors de la réunion ? J’ai du mal à saisir votre concept de garde rapprochée. »

L’humain nommé Daisuke me répond de mauvaise grâce. Je soutiens son regard, tout à fait conscient de l’animosité ambiante à mon égard. Je suis considéré comme un intrus dont on veut se débarrasser. Hors, me renvoyer signifierai refuser la paix et donc prendre le risques de tumultes, autant commerciaux que militaires. Quant aux paroles de Daisuke… Escorter la princesse. La suivre comme de braves petits chiens. Je m’abstiens de plisser le nez de dégoût. Je suis donc relégué à une tâche aussi ingrate, moi, un ancien conseiller royal..

L’abruti blond débarque, coupe la parole, tel un sauvage mal éduqué, arguant qu’ils n’ont pas besoin de moi pour la protéger et que je suis fautif dans sa chute. J’arque un sourcil, le regardant dédaigneusement de haut en bas sans pour autant prendre la peine de lui répondre et détourne mon attention, tandis que la porte s’ouvre sur la princesse.

Sa tenue est… Intéressante. Je ne comprends pas le choix d’une robe aussi sombre, alors que les humains sont réputés pour leur goût de la lumière. Son expression s’est également transformée, en quelque chose de plus royal, de plus dur. J’entrevois enfin la vraie princesse qu’elle devrait être ; sûre d’elle et inébranlable tel un roc. Mais ce n’est qu’un masque, et ce n’est pas moi, bercé dans l’art du complot et des apparences, que l’on pourra berner avec ça.
Chacun prend sa place auprès de la princesse. Tout est bien rôdé, sans place pour un nouveau venu. Je me contente de me placer en arrière, à quelques pas de là, pour les suivre docilement et pouvoir explorer du regard sans être observé par cinq paires d’yeux inquisiteurs.

Nous arrivons rapidement. J’ai déjà mémorisé le chemin. La princesse se tourne vers moi, me congédie. Élan de gentillesse, ou encore de la suspicion à mon égard ? Peut être un mixte des deux. Je m’incline et me redresse, restant là le temps qu’elle entre dans la salle de réunion. Je reste encore un moment dans le vague alors que les portes se referment. Je ne sais que penser de cette princesse. Evidemment, mon objectif ne change pas. Les moyens utilisés non plus. N’empêche que je la trouve à cheval sur le protocole, peu adaptée à son poste. Et surtout, surtout, si c’est elle qui gèrent les réunions et non le roi.. Pourquoi ce dernier n’a-t-il pas abdiqué en faveur de sa fille ?

Ces réflexions restent cependant vaines. Ce n’est pas en un jour que je pourrai cerner l’entièreté du château. Dans l’immédiat, mes objectifs principaux sont d’explorer le château, trouver ses points faibles et ses points forts, et exploiter au maximum mes informations. De même, je dois commencer à trouver des informateurs que personne ne soupçonnera et fonder une nouvelle branche d’espionnage à mon compte ici, pour compléter celle que j’ai en Hell.
J’avais donc quelques heures devant moi, avec toute l’aisance possible pour commencer mes affaires. La femme invisible était entrée dans la salle avec les autres, je n’étais donc pas suivit.  Et je doutais que l’un des esprits s’attarde à vérifier tous mes actes. Les soldats du château devaient être les seuls à me tenir à l’œil à l’heure actuelle.

Je fais donc volte-face pour me diriger vers le hall du château, afin de mettre en branle mes plans.

Spoiler: